Balaoo 3.5 - Drames publics et tragédies privées. La grande presse s'affole

V

DRAMES PUBLICS ET TRAGÉDIES PRIVÉES

LA GRANDE PRESSE S’AFFOLE
Voici dans quelles circonstances mémorables le malheur privé de la famille Saint-Aubin prit les proportions d’une catastrophe publique.
 
Il faut d’abord citer deux petites notes qui parurent, l’une dans La Patrie en danger, et l’autre dans L’Observateur impartial. Elles avaient passé quasi inaperçues. Ce n’est que plus tard que l’on s’imagina de les rattacher aux événements extraordinaires qui vinrent bouleverser l’existence de la cité. La Patrie en danger racontait dans ses Faits-Paris : « L’audace des étrangers ne connaît plus de limites. Ils traitent Paris en ville conquise. C’est un fait que chacun de nous peut observer. Au théâtre, il leur faut les meilleures places et la terrasse des cafés leur appartient. Hier soir, deux étudiants roumains qui venaient de s’arrêter devant la brasserie Amédée, rue des Écoles, ont tué froidement à coups de revolver[18] un petit chien qui les gênait pour s’asseoir. Poursuivis par la foule indignée, ils n’ont eu que le temps de grimper à une gouttière du musée de Cluny pour échapper au châtiment qui les attendait. C’est en vain que le sympathique conservateur de notre musée national, M. Haraucourt, a interrompu son travail pour chercher les délinquants. Ils avaient pu prendre la fuite par le truchement d’une gargouille du haut de laquelle un honnête homme se serait, vingt fois, rompu le cou. »
 
Le même jour, on lisait dans L’Observateur impartial, sous ce titre TOUT LE MONDE N’AIME PAS LES CACAHUÈTES : « Si cette bonne pâte de contribuables qu’est le public parisien s’avisait de temps à autre de se faire justice lui-même quand il est à bout de toutes les vexations qu’on lui impose, la vie redeviendrait peut-être plus agréable dans notre chère capitale. Il y a quelques années, on pouvait encore s’asseoir à la terrasse d’un café sans être appréhendé par les marchands ambulants. Il n’en est plus de même, hélas ! aujourd’hui, et nous comprenons très bien que l’on devienne subitement enragé devant l’obstination d’un négociant en cacahuètes dont on a refusé vingt fois déjà la marchandise. Hier soir, au café Sarah-Bernhardt, deux jeunes attachés à la légation du Japon, las d’un supplice qu’on ne leur a sans doute point appris à supporter dans les rues de Nagasaki, ont carrément envoyé rouler dans le ruisseau un marchand de cacahuètes un peu trop entreprenant. Ce petit événement, arrivant dans l’entracte, avait causé quelque scandale, et déjà les représentants du préfet de police s’apprêtaient à verbaliser, quand les jeunes Japonais eurent l’adresse de disparaître avec une agilité de singes, s’accrochant à un tramway qui passait et grimpant à l’impériale, sans passer par l’escalier, à la seule force des biceps, sans doute pour prouver à messieurs les voyageurs de Montrouge-Gare de l’Est que l’on n’est point manchot dans l’empire du Soleil Levant. »
 
À la fin de la semaine, on lisait encore dans les échos mondains du Gaulois des dimanches : « S. A. R. le maharaja de Karpurthagra, qui est venu en France pour étudier nos mœurs et coutumes et les bienfaits de la télégraphie sans fil, soupe tous les soirs chez Maxim. Son Altesse a rapporté de son pays une recette de riz cru au champagne qui fait les délices des habitués de l’endroit où il est toujours de mode, pour une clientèle bien parisienne, de venir se reposer des travaux du jour. Henry, le gérant que tout le monde connaît, recommande pour la confection de ce plat exotique, mais succulent, l’emploi du Minimum brut de la maison Boistes-Chansons (marque incomparable). »
 
Nous n’avons aucune raison également pour passer sous silence ces lignes singulières que chacun put lire dans Le Courrier des théâtres, au lendemain du mariage de Mlle Ariette des Barrières, la divette bien connue, avec le ténor Massepain : « Contrairement à la coutume qui s’est implantée chez nous de la disparition des époux après le léger lunch qui suit la cérémonie nuptiale, les nouveaux mariés avaient résolu de passer comme jadis la première journée de noces au milieu de leurs amis. Comme ceux-ci sont nombreux, il ne fallut pas moins de la grande salle des fêtes du restaurant de Mouilly pour les réunir à peu près tous. C’est que tous les théâtres et tous les genres de talents étaient là représentés autour de la toute gracieuse Ariette, si jolie dans sa robe blanche et sous la couronne de fleurs d’oranger. La fête promettait d’être des plus réussies et la gaieté générale commençait à monter autour des tables où se trouvait servi un festin pantagruélique, quand un incident des plus ridicules et des plus funestes vint tout bouleverser.
 
« Un farceur (était-ce bien un farceur ? On ne sait, en vérité, quel nom donner à ce sinistre plaisant), enfin, un individu que l’on n’a pu reconnaître tant il s’était si bien fait une étrange tête de prince Charles à monocle, se présenta à l’entrée des salons, demandant à dire deux mots à la mariée. Son allure était si bizarre et l’agitation de tout son inquiétant personnage si menaçante que les domestiques le consignèrent dans le vestibule et allèrent prévenir aussitôt M. Massepain qui se leva et vint très étonné aux renseignements.
 
« Le sympathique ténor se trouva en face d’un visiteur qui ne voulut point donner son nom et qui, sans s’arrêter une seconde de remuer, de se balancer, de se dandiner, dans une imitation grotesque de prince Charles des Folies-Bergères, déclara qu’il ne s’en irait pas tant qu’il n’aurait pas dit deux mots à la mariée. Il ajouta (ce qui fit rire, du reste, tous ceux qui l’écoutaient), en aspirant l’air grossièrement : “Ah ! je sais bien qu’elle est ici ! Ça sent la fleur d’oranger !”
 
« M. Massepain, légèrement impatienté par le genre de plaisanterie qui menaçait de se prolonger, voulut prendre le bras de son interlocuteur, mais il fut repoussé avec tant de brutalité que des cris indignés partirent aussitôt du groupe d’invités qui étaient venus le rejoindre. Certains voulurent intervenir et secouer d’importance le malotru ; mais M. Massepain les écarta et, s’avançant vers le personnage qui tournait dans le vestibule comme un ours dans sa cage :
 
« – Monsieur, lui dit-il, je ne sais pas qui vous êtes !
 
« – Moi non plus, répondit l’autre, mais je sais que la mariée est là. Quand je lui aurai parlé, je m’en irai. Vous n’avez qu’à lui dire un mot, un seul, et elle me recevra tout de suite ! »
 
« Le scandale prenait une proportion telle que M. Massepain, pour y mettre court, demanda au visiteur :
 
« – Quel mot faut-il donc lui dire ?
 
« – Dites-lui Bilbao !
 
« – Bilbao ?
 
« – Oui, Bilbao ! elle comprendra, allez.
 
« – Bilbao ! répétait-on, en se moquant, il grandira, car il est espagnol ! »
 
« À peine l’affreux individu se fut-il aperçu que l’on avait l’air de se moquer de son Bilbao (son pays d’origine, sans doute), qu’il redevint tout à fait furieux. Bousculant et renversant tous ceux qui voulaient s’opposer à sa marche en avant, il pénétra dans la salle des fêtes. La mariée s’était réfugiée dans un cabinet particulier ; mais ce fut précaution perdue, car l’autre devina où elle était et, renversant tables et chaises, brisant vaisselle et service pendant que les invités couraient aux fenêtres du boulevard Saint-Germain pour appeler au secours, arrivait contre la porte qui le séparait de notre Ariette nationale et défonçait l’huis d’un coup de soulier terrible. Arrivé auprès de la mariée qui se pâmait dans les bras de ses demoiselles d’honneur, il parut étonné et lui demanda pardon en disant tout haut : “Tiens ! Je me suis trompé !” Et il revint à pas tranquilles et le sourcil froncé dans la salle des fêtes où régnaient un désordre et un tumulte bien compréhensibles. Des gardiens de la paix, montés en hâte, voulurent lui mettre la main au collet, mais il fit un bond jusqu’à une fenêtre et sauta dans un arbre. Une foule énorme, attirée par les cris qui venaient du restaurant, stationnait sur le boulevard. Des clameurs accueillirent l’apparition et la fuite de l’homme qui sautait de branche en branche, d’arbre en arbre avec une vélocité surnaturelle qui lui permit bientôt d’échapper aux agents qui le poursuivaient.
 
« L’opinion générale est que l’on s’est trouvé aux prises avec une espèce de clown de music-hall (chacun sait que Mlle Ariette des Barrières a débuté au music-hall), en tout cas, un vilain monsieur qui croyait peut-être avoir à se venger de notre charmante divette. M. Massepain a fait toutes ses déclarations à la police, et nous saurons bientôt ce qu’il y a au fond de cette méchante histoire, pour laquelle nous adressons à Mlle Ariette des Barrières et à son sympathique époux, nos bien sincères condoléances. »
 
Voici maintenant une autre note publiée par Le Gaulois des dimanches : « S. A. R. le maharaja de Karpurthagra proteste auprès de nous qu’il n’est pas encore entré chez Maxim depuis son arrivée à Paris, et qu’il ne faut point le confondre avec l’individu qui a apporté dans cet établissement de premier ordre la mode du riz cru au champagne (Minimum brut Boistes-Chansons : marque incomparable). Nous avons téléphoné à Henry (le gérant bien connu), qui regrette d’autant plus cette usurpation de qualité chez son client qu’il n’a plus revu celui-ci et que personne ne s’est encore présenté pour payer l’addition. »
 
Quelques journaux reproduisirent ces notes agrémentées de commentaires plus ou moins spirituels à la mode du Boulevard, et puis ces divers incidents semblaient totalement oubliés quand La vie à Paris publia dans sa feuille du soir un filet surmonté d’un titre en gros caractères :
 
RÉAPPARITION DU FAUX MAHARAJA DE KARPURTHAGRA. Après avoir rappelé la première apparition de ce seigneur chez Maxim, le journal disait :
 
« La rue royale était hier soir en émoi : un chauffeur d’auto, qui avait été victime des fantaisies du faux maharaja, le reconnut à la terrasse du café Durand où il buvait tranquillement un bock avec la sérénité d’une honnête conscience. Aussitôt le chauffeur arrêta sa voiture au ras du trottoir et se précipita sur son altesse pseudo-hindoue, lui réclamant le prix d’une nuit d’automobile à travers les rues les plus gaies de la capitale ; mais, sans doute, le maharaja d’on ne sait plus quel Karpurthagra avait-il, lui aussi, reconnu son chauffeur, car il s’empressa de quitter la terrasse et de lâcher son bock, en oubliant naturellement de le payer. Les garçons se joignirent au chauffeur dont les cris eurent vite fait d’ameuter les badauds. Les gardiens de la paix accoururent, et notre maharaja aurait infailliblement passé la nuit au poste, si, par un mystère de gymnastique qui reste à expliquer, il ne s’était enfui dans le feuillage déjà touffu des arbres du boulevard où il fut impossible de le retrouver. »
 
Cette manière toute personnelle qu’avait le faux maharaja de Karpurthagra de se dérober à toutes les poursuites devait avoir pour conséquence de faire naître dans l’esprit de M. Massepain et de ses amis un rapprochement tout naturel entre cet étrange personnage et le singulier visiteur du café de Mouilly. Il n’y a pas tant de gens à Paris capables de se sauver dans les arbres. Enfin, il se trouva une feuille du Quartier latin pour émettre cette hypothèse qu’il devait y avoir une corrélation entre les faits du boulevard Saint-Germain, de la rue Royale, et l’escalade des murailles, grilles, gouttières et gargouilles du musée de Cluny.
 
Les journaux eurent tôt fait de mettre tous les événements bizarres qui s’étaient passés depuis quelques mois à Paris sur le compte d’un mystérieux clown dont les fantaisies, dénotant un esprit atteint de folie, risquaient de devenir dangereuses pour la population.
 
Et c’est à ce moment que la presse manqua de ce sang-froid auquel j’ai fait allusion en tête de ce chapitre et dont elle avait tant besoin, pour le communiquer à notre population, que les entreprises fantastiques et criminelles de l’insaisissable maharaja allaient exciter et troubler, jusqu’au délire. La première manchette, qui répandit l’émoi, était ainsi libellée :
 
JEUNES FILLES, NE QUITTEZ PAS VOS PARENTS !
 
Elle (la manchette) surmontait un article où il était dit que le clown mystérieux qui marche dans les arbres avait été vu dans un marronnier des Tuileries (celui justement qui avait donné, cette année-là, la fleur du 20 mars), et qu’on avait des raisons de croire qu’il n’y était pas seul. Des personnes dignes de foi prétendaient l’avoir vu emporter, comme un sauvage, une jeune fille dans ses bras.
 
Mais cette première manchette (qui répandit l’émoi) n’était rien à côté de la seconde qui, elle, répandit la terreur :
 
QUATRE JEUNES FILLES DISPARUES
 
Un monstre, indigne du nom d’homme, les traîne par les cheveux dans les arbres, les emporte, comme une proie, sur les toits de la capitale.
 
C’est La Patrie en danger qui parut, à quatre heures de l’après-midi, avec cette manchette émouvante et tragique.
 
Les camelots qui affolaient la foule de leurs cris et de leurs courses insensées, vendirent des numéros jusqu’à cinq sous pièce. Les pères et les mères de familles voulaient, avant tous les autres, être renseignés, et ne regardaient pas, ce jour-là, à la dépense. À la terrasse des cafés on s’arrêtait de boire, sur les trottoirs on s’arrêtait de marcher. Et on lisait. Tout le monde lisait ou écoutait lire ; c’était, du reste, très simple. Depuis le matin, quatre jeunes filles avaient disparu, emportées par le monstre ; une, au coin de la rue de Médicis et de la rue de Vaugirard ; une autre, en plein boulevard Saint-Germain ; une troisième, près du square Louvois ; une quatrième avait été cueillie sur l’impériale d’un tramway qui passait sur le quai du Louvre, toujours dans des endroits où il y a des arbres. Le monstre se cachait dans les arbres et, soudain, allongeait la main, tirant avec une force invisible les cheveux de la jeune fille. La jeune fille, poussant des hurlements, suivait, et si rapidement que personne n’avait le temps de la retenir. Une jeune personne, qui sortait de l’hôpital et qui se reposait sur un banc du square Montholon, n’avait dû son salut qu’à ce qu’au cours de sa maladie, on lui avait rasé la tête. Le chignon seul était resté entre les mains du monstre.
 
Quant au monstre, il était doué d’une vélocité infernale et on le cherchait encore dans les arbres qu’il apparaissait de l’autre côté de la rue ou du boulevard sur un toit pour disparaître, presque aussitôt, avec sa proie.
 
La préfecture de police était sur les dents.
 
On exigeait du conseil municipal des mesures exceptionnelles. Des imbéciles, comme il y en a toujours dans les moments les plus difficiles où personne n’a envie de rire, des imbéciles prétendirent qu’il n’y avait qu’un moyen de se débarrasser du clown mystérieux qui marche dans les arbres, c’était de couper tous les arbres ! Les familles des jeunes filles disparues étaient interviewées par tous les journaux et soigneusement photographiées jusqu’au quatrième degré. La Ville Lumière perdait la tête.
 
Mais l’incroyable scandale éclata véritablement sur la cité en épouvante, avec la fameuse manchette de dernière heure du premier journal d’information du monde : L’Époque. La voici dans toute son horreur :
 
PARIS EN PROIE AU MINOTAURE
 
On connaît le monstre. C’est une bête à cerveau humain. L’anthropopithèque qui parle. Formidable invention du professeur Coriolis Boussac Saint-Aubin.
 
Et voici l’article qui fut reproduit par tous les journaux du monde :
 
« Il n’y a point de mystère pour L’Époque.
 
« Cette fois encore, à cette heure critique, L’Époque a réussi à pénétrer le secret de la personnalité étrange et redoutable du voleur de jeunes filles. Déjà nous pouvons dire aux mères : Rassurez-vous ! car, instruits par l’Époque de l’ennemi qu’il faut vaincre, les pouvoirs publics sauront bientôt nous débarrasser de cette épouvante.
 
« C’est en étudiant pas à pas les apparitions fantastiques de celui que l’on a pris pour un clown frappé de folie que nous avons pu circonscrire peu à peu l’espace dans lequel le monstre évoluait à l’ordinaire.
 
« Nous fûmes ainsi conduits au Quartier latin, et de là rue de Jussieu, où nous avons frappé à l’hôtel désert de son maître, un homme dont le nom retentira à travers les siècles : M. Coriolis Boussac Saint-Aubin.
 
« Dans cet hôtel (dans lequel nous avons pénétré par une fenêtre), toutes choses se trouvent dans le plus grand désordre. L’immeuble paraissait avoir été abandonné avec précipitation.
 
« Nous fûmes reçus cependant par un perroquet qui ne cessa pendant plus d’une heure de nous crier avec fureur un mot ou plutôt un nom auquel nous ne comprîmes rien tout d’abord, mais qui restera, lui aussi, célèbre dans l’histoire des races ! Balaoo ! Balaoo ! Balaoo !… Balaoo, c’est le nom de bête du monstre qui, dans la vie parisienne, a son nom d’homme : M. Noël ! Balaoo ! c’est le nom du premier singe qui aura parlé la langue des hommes !
 
« Ah ! dans son quartier, on connaît M. Noël ! Ses allures bizarres, sa singulière laideur, son dandinement caractéristique, n’avaient pu passer inaperçus, et les grimaces qu’il fait autour de son monocle ont plus d’une fois excité les rires et les plaisanteries des petits vauriens de la rue. Mais qui donc aurait pu jamais se douter que ce personnage un peu excentrique, mais jusqu’alors correct, était l’anthropopithèque de Java, car M. Noël est un habitué du Vachette et de la brasserie Amédée. M. Noël va à la Faculté de droit ! M. Noël fait partie, au palais de justice, de la conférence Bottier ! M. Noël s’habille comme un honnête homme ! M. Noël parle français comme vous et moi. Et cependant, ô prodigieux mystère des rues, M. Noël n’est pas un homme ! M. Noël n’est qu’un anthropoïde ! Il a quatre mains ! Il s’apparente directement au grand chimpanzé oriental des forêts de Java dont on a pu voir le type au jardin des Plantes dans le singe Gabriel.
 
« Et maintenant, quel est ce mystère qui va bouleverser le monde ? Comment sommes-nous arrivés à pénétrer un pareil secret ? Comment avons-nous pu rejoindre le maître de Balaoo ? Tout ceci s’est passé de la façon la plus simple, mais encore fallait-il y penser ! Nous nous sommes d’abord emparé des papiers qui traînaient dans les cartons du cabinet de travail de M. Coriolis Saint-Aubin. C’est là que nous avons trouvé les fiches les plus curieuses que l’on puisse concevoir concernant la transformation de Balaoo en M. Noël. Ces fiches, certes, ne nous appartiennent pas. De par leur importance, nous pouvons dire qu’elles n’appartiennent pas davantage à M. Coriolis Saint-Aubin, leur naturel propriétaire. Elles appartiennent à la science universelle. Aussi nous les publierons prochainement !
 
« En attendant, notre devoir était tout tracé. Il nous fallait atteindre le plus tôt possible l’homme dont l’imprudence scientifique avait déchaîné ce monstre sur l’humanité. Il ne faisait pas de doute, pour nous (à regarder le désordre de son hôtel), que cet homme, que ce savant génial, mais dangereux, avait fui, fui évidemment devant les conséquences abominables de son audace, fui en apprenant les crimes de son terrible élève !
 
« Nous nous livrâmes immédiatement à une enquête des plus serrées sur les derniers gestes publics de Coriolis Saint-aubin et nous apprîmes qu’il y a quelques jours, il avait marié sa fille à son neveu M. Patrice Saint-Aubin ; que cette cérémonie s’était passée dans la plus stricte intimité, presque dans l’incognito (!), que M. Noël n’y avait pas assisté, et que les jeunes époux prenaient hâtivement le train d’Auvergne pendant que, presque à la même heure, le clown mystérieux qui marche dans les arbres faisait le scandale que l’on sait au lunch qui avait suivi le mariage de Mlle Ariette des Barrières et du ténor Massepain.
 
« Cette coïncidence des deux événements, la fuite des jeunes mariés et le scandale du boulevard Saint-Germain, nous donna fort à réfléchir. Le résultat de ces réflexions ne pouvait être douteux. Il modifiait légèrement la conception que nous avions eue d’abord de la fuite de Coriolis. M. Noël poursuivait la mariée ; nous pensâmes que le père avait couru après M. Noël pour en débarrasser sa fille. M. Coriolis devait craindre un drame. Était-il arrivé à temps ? Les avait-il rejoints ? Nous nous sommes élancés sur ses traces, et aujourd’hui nous pouvons dire que malheureusement M. Coriolis est arrivé trop tard ! Il a retrouvé, sur la route du Bourbonnais, son gendre ; mais sa fille avait disparu, et dans des conditions épouvantables qui ont été certainement comme le prélude de tous les crimes, de tous les rapts dont gémit, aujourd’hui, la capitale !
 
« Ah ! la responsabilité de ce fou de génie qu’est M. Coriolis Saint-Aubin est véritablement effrayante, effrayante devant l’histoire, devant la science, et devant la justice !
 
Si nous prononçons ce dernier mot de justice, ce n’est point qu’il nous appartienne d’attirer les foudres de Thémis sur un homme qui a cru accomplir une grande œuvre ; nous ne faisons là encore qu’acte d’information. M. Coriolis Saint-Aubin est en ce moment sous les verrous ! Il s’est constitué prisonnier, il y a deux heures ! C’est sur sa prière que nous l’avons conduit nous-mêmes devant notre nouveau préfet de police, M. Mathieu de La Fosse !…
 
« On connaît le fauve, on connaît le dompteur ; il ne s’agit plus, espérons-le, que de les mettre en face l’un de l’autre. Mais qu’on prépare la cage ! la cage dans laquelle on enfermera le nouveau minotaure qui, puisqu’il parle français, consentira peut-être à nous dire ce qu’il a fait de ses victimes !
 
« Dernière minute : deux de nos rédacteurs nous font téléphoner qu’ils viennent de retrouver les traces du monstre sur les toits de l’hôtel de ville où il se promène, en pleine sécurité, comme chez lui. Nos rédacteurs vont immédiatement organiser une battue. »
 
 
Tel était cet article qui eut le pouvoir de faire se ruer tous les journalistes de la capitale chez le préfet de police. Mais là, ils apprirent que M. Mathieu de La Fosse, le nouveau préfet, que l’avènement d’un ministère ultra-radical-socialiste venait de relever si triomphalement de sa disgrâce, était à la place Beauvau où le ministre de l’Intérieur venait de réunir d’urgence tous ses collègues du cabinet.
 
Nous ne pouvons mieux faire que de publier la note quasi officielle qui fut dictée à tous les journalistes présents, à la suite de ce conseil de cabinet où fut entendu M. le préfet de police.
 
M. le président du conseil avait voulu que les détails précis de cette mémorable séance fussent portés à la connaissance du public, dans un moment où il n’y avait plus une famille, à Paris, qui pût se croire en sécurité[19].
 
M. le préfet de police a été entendu hier par les ministres réunis en conseil de cabinet. Voici ce qu’il leur a déclaré :
 
« Un homme, dont je n’avais jamais entendu parler, M. Coriolis Boussac Saint-Aubin, me faisait passer sa carte, en me priant de le recevoir sur-le-champ. Je lui fis demander ce qu’il me voulait ; mais il me répondit qu’il ne parlerait que devant moi, et qu’il fallait se presser, car il s’agissait d’une question de vie ou de mort.
 
« Je le fis entrer.
 
« Il ne me parut point fou. Avant même que je lui eusse adressé la parole, il me disait d’une voix nette, bien posée et profondément douloureuse :
 
« Monsieur le préfet de police, je suis un misérable, je viens me constituer prisonnier entre vos mains. C’est moi qui suis le seul coupable de tous les crimes qui épouvantent aujourd’hui Paris et pour lesquels on poursuivrait en vain un pauvre être auquel je ne suis point parvenu à donner la responsabilité.
 
« Oui, monsieur le préfet de police, j’ai fait cela, moi ! J’ai fait parler un singe !… comme un homme ; mais je ne suis point parvenu, malgré tous mes efforts, à lui donner une conscience humaine !… JE L’AI RATÉ !
 
« Car j’ai raté tout, monsieur le préfet de police, je suis un médecin raté, un professeur raté, un commerçant raté, un fonctionnaire raté… J’avais rêvé d’être le premier des hommes… ; en pouvant réaliser mon rêve insensé, j’ai été chercher un singe au fond d’une forêt de Java, pour en faire le dernier des hommes !…
 
« Eh bien ! cela encore, je ne l’ai pas réussi !… Je suis maudit !… Dieu m’a frappé comme je le mérite !… J’ai voulu refaire ou hâter son œuvre… Hâter l’œuvre de Dieu, voilà le crime de l’orgueil des hommes… J’y succombe.
 
« Mon scalpel a pu, en tranchant un nerf, et en me permettant d’en rapprocher un autre sous la langue, avancer de cent mille années l’œuvre de transformation de l’espèce ; mais moi, je n’ai pu donner (n’ayant aucun instrument pour cela) les cent mille années de conscience nécessaires à mon anthropopithèque, pour qu’il se promenât sans danger parmi les hommes… sans danger qu’il commît des crimes inconscients… car, pour les autres, monsieur le préfet de police, les hommes s’en chargent !… »
 
« Sur ces mots, qui furent accompagnés de larmes et d’une grande crise de désespoir, M. le préfet de police posa les questions les plus précises à M. Coriolis Saint-Aubin, et celui-ci lui répondit de telle sorte qu’il n’est plus possible de douter de la nature du monstre auquel nous avons affaire !
 
« Dans ces conditions, il a été décidé que toutes mesures seraient prises pour s’emparer de Balaoo, coûte que coûte, mort ou vivant !…
 
« Les instructions, sur ce point, donnent plein pouvoir à M. le préfet de police.
 
« Nous devons cependant enregistrer le désir exprimé par M. le ministre de l’Instruction publique et aussi par M. le ministre de l’Agriculture que ce monstre fût, autant que possible, capturé vivant, l’étude d’un pareil phénomène devant être des plus attachantes pour la science universelle. »
 
Suivait une note, émanant, celle-là, directement de la préfecture de police, et faisant entendre qu’après toutes les recherches auxquelles les agents s’étaient livrés dans tous les coins de la capitale pour retrouver au moins la trace des jeunes filles emportées par le monstre, bien peu d’espoir restait d’en découvrir, par le plus grand des hasards, même les cadavres. Ce mot sinistre n’était pas prononcé, mais on l’entendait derrière les lignes de la communication officielle. On avait tout fouillé, tout, jusqu’aux égouts ! Le monstre avait-il donc pris les jeunes filles pour les manger ?
 
Traqué sur les toits de l’hôtel de ville, par les journalistes, les pompiers, les employés de bureau, et aussi par les agents des brigades centrales requis à cause de leur force bien connue, de leur poitrine large et de leurs poings solides (ceux-ci avaient reçu mission d’essayer de capturer le monstre vivant), on avait pu croire un moment qu’on le tenait.
 
De fait, la course avait été menée avec un entrain qui tenait de la rage et du désespoir. De mansarde en mansarde, de cheminée en cheminée, on l’avait fait reculer jusque sur le toit d’un petit pavillon, en face de la caserne Lobeau.
 
Les agents des brigades centrales, les uns munis de filets et les autres de lassos, sorte de nœud coulant dont ils paraissaient fort embarrassés, étaient prêts à se jeter sur lui, quand on amena sur la gouttière le professeur Coriolis lui-même, qui constata que, malgré l’horreur de cette lutte tragique, le monstre avait conservé un peu de ce vernis de civilisation qu’il avait eu tant de mal à lui inculquer. L’anthropopithèque, en effet, lui apparut, une seconde, entre deux cheminées (bondissant de l’une à l’autre), le monocle à l’œil !
 
– Balaoo !… Balaoo !… cria-t-il, d’une voix tendre et désolée où il y avait moins de colère et de reproches que de désespoir qui demandait à être consolé !… Balaoo !…
 
Mais, à cette voix, à ce cri, au lieu de répondre à celui qui l’appelait, l’autre sembla retrouver une nouvelle énergie. La peur qui, tout à l’heure, l’avait fait fuir, se tourna en rage et, fonçant comme un bolide sur un groupe d’agents et de quelques employés de bureau (ces derniers, à tout hasard, s’étaient armés de leur couteau à papier), il les bouta hors de la gouttière et les fit (trois ou quatre) basculer dans le vide.
 
Les malheureux allèrent s’écraser sur la place, au milieu de la populace accourue et de mille cris d’horreur.
 
Vingt coups de feu retentirent alors autour du monstre qui les reçut presque à bout portant sans avoir l’air de s’en soucier, et qui rentra à nouveau dans l’hôtel de ville par une mansarde après avoir, d’un coup de poing, assommé un agent de la brigade centrale qui montrait sa tête à cette mansarde.
 
Et le monstre se rua dans les corridors.
 
On le vit passer comme une flèche à travers tous les services. Des contribuables, qui attendaient là, depuis des jours, l’occasion d’être reçus, s’enfuirent en hurlant et on ne les revit plus jamais.
 
De corridors en escaliers, il pénétra dans la salle du conseil municipal où M. Mathieu de la Fosse essayait en vain de rassurer les vingt édiles qui n’avaient pas encore abandonné la séance (au fond, ils s’y croyaient peut-être plus en sûreté qu’ailleurs).
 
Là aussi, ce fut un sauve-qui-peut général, mais ils tremblaient tous encore que l’autre était passé depuis longtemps… passé et disparu !…
 
Pendant vingt-quatre heures, on ne sut ce qu’il était devenu. On le chercha partout. On alla jusqu’à enfumer les caves de l’hôtel de ville pour l’en faire sortir dans le cas où il y aurait un refuge.
 
Un cordon de troupes, avec munitions de guerre, entourait le bâtiment municipal. Cinq agents de la Sûreté traînaient partout le professeur Coriolis qui, les cheveux épars et l’œil fou, se laissait conduire des caves au grenier en appelant : Balaoo ! Balaoo !…
 
Mais Balaoo ne répondait pas !…, Qu’était-il devenu ? Aucune nouvelle jeune fille n’avait disparu dans la ville (du fait de Balaoo ou autre). Et cela s’explique en ce qu’on les tenait, les jeunes filles, toutes étroitement enfermées dans la demeure de leurs parents. Les séances du conseil municipal avaient été suspendues jusqu’à nouvel ordre. Et l’angoisse était plus grande que jamais, doublée du mystère de cette disparition, quand, le soir même, le monstre réapparut au sommet de la tour Saint-Jacques. Les employés du bureau météorologique l’avaient aperçu les premiers et s’étaient enfuis en le signalant aux agents. Cette fois, on pensait bien toucher à la fin du drame.
 
La tour Saint-Jacques, isolée immédiatement par un cercle de police et de troupes, demeurait un bien petit et dangereux refuge pour Balaoo.
 
Celui-ci sembla, du reste, s’en rendre compte, car, se voyant serré de si près par cette foule en armes et ce peuple qui criait vers lui mille malédictions, il entra dans une fureur peu commune, même chez les grands singes orientaux de Java.
 
On entendait ses longs roulants et grondants cris jusqu’à la place de la Bastille et jusqu’au Louvre. La circulation était naturellement interrompue dans la rue de Rivoli. Sur la plateforme des omnibus et des tramways, tout le monde était debout, montrant le poing à la tour Saint-Jacques et hurlant à la mort de l’anthropopithèque.
 
Quelquefois on apercevait l’ombre dansante et culbutante du monstre au sommet même de la tour, mais presque aussitôt disparu, il réapparaissait, faisant du trapèze à un échafaudage.
 
On avait déjà tiré sur lui plus de cent coups de fusil et l’on n’avait réussi qu’à augmenter, semblait-il bien, sa rage. Abrité derrière les échafaudages, il se mit à lancer des projectiles sur la foule.
 
Ce fut une véritable pluie de pierres qui s’abattit, frappa, blessa, tua. Les abords de la rue de Rivoli et du square Saint-Jacques furent ainsi vite nettoyés par le monstre. La troupe et les agents eux-mêmes durent reculer. Pour se défendre, l’anthropopithèque démolissait la tour Saint-Jacques !
 
Et cela avec une telle rapidité qu’il y eut des loustics (il y en a toujours pour faire de l’esprit quand on ne leur demande rien) pour prétendre qu’avec trois ou quatre jours de siège, il ne resterait plus de la tour Saint-Jacques que ses échafaudages !
 
C’était bien exagéré ! Mais enfin, il ne faisait point de doute que les plus belles gargouilles gisaient en miettes sur la chaussée et qu’à tout prendre, le monstre allait plus vite à démolir le fameux monument que les ingénieurs de la ville à le réparer.
 
Et cela dura tout la nuit.
 
 
Au matin, M. Mathieu de La Fosse arriva avec les cinq agents qui traînaient toujours M. Coriolis Saint-Aubin. Le nouveau préfet de police était dans un état pour le moins aussi lamentable que l’ex-consul de Batavia lui-même. Il avait moins de désespoir et de douleur, mais plus d’exaspération. Une sorte de fatalité diabolique paraissait attachée à sa carrière et il ne pouvait mieux comparer les difficultés actuelles, singulières et tragiques, qu’aux événements inouïs du siège des Bois-Noirs alors qu’il était préfet du Puy-de-Dôme.
 
Derrière le groupe, suivait un énorme monsieur tout guêtre de cuir fauve et portant sur l’épaule une carabine.
 
L’attention populaire s’était attachée dès l’abord à ce nouveau personnage.
 
C’était un géant.
 
Il dépassait la foule d’une bonne tête. Bientôt son nom courut là foule, car cet homme était célèbre. C’était le fameux Barthuiset, le tueur de lions.
 
S’il fallait en croire la légende et ce qui se racontait autour des tables de café, sur le boulevard, à l’heure de l’apéritif, cet homme avait, en Afrique, tué plus de lions qu’il n’y en eut jamais dans l’Atlas.
 
C’était sur lui que M. Mathieu de La Fosse comptait pour tuer Balaoo.
 
Depuis le matin, Balaoo ne donnait plus signe de vie, mais on se méfiait et personne n’avait osé s’approcher des échafaudages.
 
Quand il fut à dix mètres de la tour, M. Mathieu de La Fosse dit à Coriolis qui paraissait hébété et tout à fait hagard :
 
– Vous allez l’appeler.
 
– Pour quoi faire ? demanda l’autre, de plus en plus stupide.
 
– Pour parlementer !… Comprenez que nous ne tuerons votre anthropopithèque qu’à la dernière extrémité… expliqua le préfet. Il nous en a déjà fait voir de toutes les couleurs. Puisque vous prétendez qu’il entend raison, parlez-lui… amadouez-le, dites-lui quelque chose, prouvez-nous enfin que ce n’est pas tout à fait un sauvage !
 
Coriolis, à ces mots, se laissa prendre.
 
Car le terrible était (et le préfet l’avait deviné) qu’en dépit des crimes de Balaoo et de l’enlèvement de Madeleine, Coriolis, instinctivement, voulait sauver Balaoo… Ses appels, sur les toits de l’hôtel de ville, étaient surtout des avertissements, des prières de fuir !…
 
Du moment qu’il ne s’agissait plus de tuer Balaoo, Coriolis allait l’appeler autrement… et, en effet, il cessa de lui adresser un appel d’homme. Et il lui cria en langage singe :
 
– Tourôô ! Tourôô ! (Tout va bien). Gooot ! (Viens). Woop ! (je t’en prie.)
 
Aussitôt, on vit, entre deux planches de l’échafaudage, le monstre qui avançait prudemment la tête, considérait anxieusement cette foule innombrable et, en ce moment, silencieuse.
 
Tant de silence après un tel tumulte, semblait le surprendre et l’inquiéter. Il assura, d’un geste hésitant, son monocle dans l’arcade sourcilière, et se pencha davantage, presque de tout son corps, au-dessus du groupe d’où venaient les mots amis de la langue de sa race :
 
– Tourôô ! Gooot ! Woop !
 
Et pan ! le coup partit ! le coup de la carabine à balle explosible de Barthuiset, le tueur de lions.
 
Un immense, prodigieux, prolongé cri, fait de milliers de milliers de clameurs, monta de la ville, du pavé de la ville délivrée.
 
L’anthropoïde avait basculé et venait, à son tour, s’abattre au pied de ces murailles dont il avait été l’effroi.
 
Mais il tomba sur un massif de terre molle et ne succomba qu’au bout de quelques minutes.
 
Alors, les hommes de la ville purent entendre l’agonie du singe, du grand singe, du grand singe anthropoïde, du grand ancêtre, telle qu’on l’entend au fond des forêts équatoriales et telle qu’elle existe dans le corps mourant de ses mystérieux frères animaux, même chez ceux qui ne sont point encore l’anthropopithèque…
 
Les hommes de la ville la connurent, cette plainte désespérée dont le voyageur Louis Jacolliot a dit : « À la suprême minute de la mort, la terrible bête rend des sons qui ont quelque chose d’humain… sa dernière plainte vous donne l’illusion d’un être plus élevé dans la classification naturelle, et il vous semble que vous venez de commettre un meurtre. »
 
Coriolis, à ce coup de feu, avait senti son cœur se déchirer et il avait pu croire, un instant, que c’était lui qui était frappé à mort… Il vit le grand corps tournoyer dans l’air, il se précipita comme pour le recevoir dans ses bras. Heureusement, l’être s’écrasa près de lui, sans le toucher. Coriolis se précipita sur cette dépouille qui mourait avec des gémissements d’homme.
 
… Il se pencha… et… tout à coup, se releva avec un cri insensé de triomphe… Ce n’était pas Balaoo !…
 
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à suivre.. chapitre 6
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Macrovision
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